La Seine tant de fois dépliée, glisse entre les falaises de craie découpées d'aiguilles ou creusées de grottes. Ici on dit des boves.
Nous sommes en 1659. Un homme fait les cent pas dans la cour du château de la Roche-Guyon. François de la Rochefoucauld médite. L'auteur des Maximes, c'est lui. Mazarin avec qui il a fait le voyage de Paris à ici, lui a dit en plaisantant : "Qui aurait pu croire, il y a seulement huit jours que nous serions dans le même carrosse". Il s’est entendu répondre : "Tout arrive en France ! "
Celui qui aux côtés du prince de Condé fut un des frondeurs les plus ardents, contemple le donjon. Il vient de marier son fils, François, avec Jeanne-Charlotte du Plessis-Liancourt. Le domaine de la Roche-Guyon est entré dans la famille La Rochefoucauld. Il y demeura jusqu’en 1989.
En 1989, la famille de La Rochefoucauld remit son domaine, pour sa sauvegarde entre les mains d’une association rassemblant l’Etat, la commune de la Roche-Guyon, le Conseil régional d’Ile-de-France, le conseil général du Val d’Oise, la Caisse d’Epargne Ile-de-France Nord.
Une importante campagne de travaux fut entreprise et menée à bien. Elle déboucha sur une remise en état et une ouverture au public en 1994 organisée par le conseil général du Val d’Oise.
Comment dans un cadre aussi grandiose pourrait-on être mesquin ?
L’endroit est sublime. Le donjon taillé en amande, renforcé par son éperon triangulaire, est dressé en sentinelle. Il est doublé pour la défensive d’une première enceinte renforcée avec une seconde enceinte en pointe. Il domine le méandre de la Seine qui coule 100 m plus bas dans la vallée. De l’intérieur du château, on peut aujourd’hui y accéder par un étroit escalier creusé dans la falaise. La nuit, par ciel de lune, la vue est immense, d’où le succès populaire des fameuses Nocturnes de La Roche-Guyon.
Source : d'après l'ouvrage de Claude Danis, Châteaux et manoirs en Val d'Oise, Editions du Valhermeil, 2002.
Impressions estivales (juil - 03)
Qu'on la regarde du haut du donjon ou d'un planeur envolé du plateau de Chérence, la boucle de la Seine est une beauté rare. En ce moment, les jaunes des champs de blé, le bleu rayé du ciel rappellent les toiles de Riopelle, Mitchell, et plus proche de nous François Hilsum.
La nature tout autour renvoie la blancheur des rayons du soleil qui baignent la vallée toute l'année. C'est un petit coin presque méridional (en tout cas tout à fait orienté plein sud !) à quelques kilomètres de Paris où les criquets, grillons et sauterelles campent. Des pinèdes à Moisson, des boves à Haute-Isle et Clachaloze, et un superbe donjon à la Roche-Guyon, aux trois points de la boucle on aime revenir.